NOV
15
1830

Cavour, Camillo Benso di a Clermont-Tonnerre, Victoire de, n. de Sellon d'Allaman, 1830-11-15 #1328


Mittente:
Cavour, Camillo Benso di.
Destinatario:
Clermont-Tonnerre, Victoire de, n. de Sellon d'Allaman,.
Data:
15 Novembre 1830.

                                                                                                  Gênes, 15 novembre 1830

    Ma très chère tante,
    Je pense que vous êtes maintenant établie au milieu du bruit et des tumultes, au sein de l'agitation, pour cela je vous adresse ma lettre à Paris. Je vous plains sincèrement de vous trouver dans la plus bruyante ville de l'univers au moment où, tout le monde voulant faire entendre sa voix à sa manière, il doit en résulter un désordre tant soit peu effrayant. Toutes les fois que je lis les journaux je pense à vous, et, en vérité, j'aimerais mieux vous savoir tranquillement à Santena ou au Bocage qu'à Paris.
    Mais je ne saurais qu'applaudir à la noble résolution, qui pour remplir un devoir sacré vous a fait braver des dangers qui auraient pu être réels. Mais enfin le printems ne tardera pas à venir et nous vous verrons tous avec le plus grand plaisir vous rapprocher de nous, dans l'espoir surtout de vous posséder tout à fait, à une époque un peu plus éloignée.
    Vous êtes partie à une époque un peu triste pour nous. On a été obligé d'en venir à de grands moyens pour sauver une malheureuse victime; jusqu'ici tout a été bien, mais il n'en reste pas moins la douleur d'avoir été contraints de briser des liens qui devraient être indissolubles. L[ascaris] est venu à Gênes, soit pour voir Barbaroux, soit pour consulter Saint-George qui est ici et dans lequel il a une grande confiance. On m'a dit qu'il était dans d'assez bonnes dispositions, certainement pas corrigé, car si l'on se corrige difficilement à tous les âges on est incorrigible à soixante ans, mais du moins profondément frappé. Saint-George m'a assuré qu'il croyait pouvoir le déterminer à voyager pendant quelque tems. Ce serait ce que l'on pourrait espérer de plus heureux.
    Il y a un grand passage ici d'étrangers, surtout de Français qui fuient le bruit et vont se reposer en Italie. Plusieurs familles genevoises sont aussi passées par ici, entre autres Mme de Stall et la famille Vernet. Une personne que vous connaissez a demeuré quelques jours ici, c'est Mr Breton le notaire: comme mon père m'avait écrit de m'occuper de lui, et que je savais qu'il était administrateur des hospices à Paris, et par conséquent curieux de voir les établissements de bienfaisance, je lui ai fait connaître mon grand ami Fabio Pallavicini qui se trouve, quoique jeune, être directeur des hôpitaux. Celui-ci a été très aimable, a accompagné mon Mr Breton partout, lui a fait visiter les établissemens depuis la cave jusqu'au grenier, enfin tous les deux ont été fort contents. Mais comme Fabio s'occupe beaucoup, il a prié Mr Breton de lui procurer les comptes des établissemens de charité à Paris. Mr Breton lui a donné à cet effet une lettre pour un Mr Valdruche, qui doit remettre les livres au porteur. Fabio n'ayant pas dans ce moment de grandes connaissances à Paris, m'a prié de me charger de son affaire; connaissant votre inépuisable obligeance, je me suis engagé à lui faire venir ses livres. Je vous envoie donc ci-incluse la lettre adressée à Mr Valdruche, en vous priant de vouloir bien la faire porter à son adresse, et de faire retirer les livres dont je vous ai parlé. Si vous n'avez pas d'occasion immédiate pour Turin, veuillez les remettre au comte de Sales, qui doit, à ce qui me paraît, entretenir une correspondance active avec le ministère sarde et les fera passer à mon père.
    Je suis honteux de vous ennuyer, mais permettez-moi encore de vous demander si vous avez été assez bonne pour faire remettre les livres que j'envoie à mon ami l'anglais à Mr Baillière, libraire à Paris, place de l'École de médecine. Vous m'obligeriez infiniment si vous vouliez ne pas oublier cette petite affaire, car j'ai reçu une lettre de mon ami Brokedon.
    Je vois quelquefois Mr Lesparda, fort aimable garçon grand amateur du beau sexe, fesant assidûment la cour à nos dames génoises qui en général ne se piquent pas de cruauté.
    Quant a moi, rien n'est encore décidé, je crois cependant que je passerai l'hiver à Turin, seulement je ne sais pas encore a quelle époque mon départ sera fixé.
    Veuillez, ma très chère tante, faire agréer mes respects à mon oncle et me croire à jamais
                                                                      votre très obéissant et très affectionné neveu
                                                                                          Camille de Cavour

divisore
Nomi citati:
chère tante, Saint-George, L, Mr Breton, Barbaroux, Fabio Pallavicini, Brokedon, Mr Lesparda, oncle, Valdruche, mon père, comte de Sales, Fabio, Baillière.
Toponimi citati:
Gênes, Paris, Bocage, Italie, Santena, Turin, place de l'École de médecine.

Allegati