OTT
19
1828

Cavour, Camillo Benso di a Cavour, Adele Benso di, n. de Sellon d'Allaman 1828-10-19 #1299


Mittente:
Cavour, Camillo Benso di.
Destinatario:
Cavour, Adele Benso di, n. de Sellon d'Allaman.
Data:
19 Ottobre 1828.

                                                                                                        Nice, 19 octobre 1828

    Chère maman,
    C'est avec bien du regret que j'ai quitté Santena au moment où il m'offrait tant de charmes; j'aurais bien voulu profiter de ce peu de momens que ma chère tante passe encore avec vous, mais c'était impossible, il fallait partir. La diligence nous a conduit à Coni sans s'arrêter; quand nous sommes descendus, il était trois heures, j'étais complètement à jeun. Jugez quel appétit brillant j'ai dû avoir, ainsi le médiocre dîner qu'on nous servit fut mangé avec avidité.  Nous logions aux Trois-Rois, auberge où va descendre la diligence; pour une nuit nous avons préféré rester où nous étions sans aller chercher un meilleur gîte ailleurs. Le lendemain à deux heures du matin nous étions en route, perchés sur le devant de la diligence de Coni à Nice; pour ne pas être exposés aux mêmes inconvéniens de la veille, nous avons amplement déjeuné à Limon. J'ai passé tout le col de Tende à pied, c'est une bien vilaine montagne; heureusement le tems était magnifique, et j'ai pu jouir du haut du col d'une vue superbe. La descente du côté de Nice est bien mauvaise, il y a tant de mauvais tournans que j'ai préféré la faire toute à pied. La route continue le long de la vallée de la Roia; je n'ai jamais vu des montagnes plus horribles, plus sauvages que ce jour-là; on s'arrête cependant avec plaisir devant la position de l'ancien fort de Saorgio; le village du même nom, bâti au sommet de la montagne au milieu d'une forêt d'alisiers, fait un effet des plus pittoresques. Le soir nous avons couché à Giandola, petit village situé au pied du col de Raus. Le lendemain à quatre heures nous continuâmes notre route, qui ne fut guère plus agréable, car on traverse deux montagnes éternelles avant d'arriver au Payon qu'on suit ensuite jusqu'à Nice. Nous avons dîné fort mal à Escarena, et le soir à cinq heures nous arrivâmes à Nice. Nous sommes  descendus à l'hôtel de Jork, c'est une assez bonne auberge, où l'on nous a logés assez bien. Il y a une assez bonne troupe qui donne trois fois par semaine la comédie, le vaudeville, le drame, le mélodrame, l'opéra etc. etc. Le soir nous y avons été; on donnait L'abbé de l'Épée et Le vendeur de canards. Le lendemain matin nous avons vu le général Faverges, qui nous a beaucoup parlé de mille et mille projets qui lui passent par la tête, et que grâce au ciel on n'exécutera pas. Après le gouverneur j'ai été chez Avigdor avec lequel je passai trois heures à causer; sa manière de voir me paraît assez juste, et ce qu' il dit de l'état présent de l'Europe n'est pas si bête; j'ai tiré quatre cents francs chez lui, comme j'étais convenu avec papa. Nous avons dîné chez le général Faverges; la marquise sa femme n'était pas visible, elle est constamment malade, ou du moins elle croit l'être, ce qui revient à peu près au même.
    Le jour de notre départ pour Vintimille n'est point encore fixé; nous attendons des caisses de Turin, et des lettres du colonel Podesta pour nous décider. Quant aux journaux je crois que je m'arrangerai avec Avigdor.
    Veuillez dire bien des choses, je vous en prie, à toute la famille et croyez-moi à toujours
                                                                                votre très obéissant et affectionné fils
                                                                                                      Camille

divisore
Nomi citati:
chère maman, Faverges, Trois-Rois, Avigdor, hôtel de Jork, Podesta, papa, marquise.
Toponimi citati:
Santena, Coni, Nice, Limon, col de Tende, vallée de la Roia, Saorgio, Giandola, col de Raus, Payon, Escarena, Europe, Vintimille, Turin.

Allegati