GEN
31
1860

Bonaparte, Napoleone Girolamo a Cavour, Camillo Benso di 1860-01-31 #4001


Mittente:
Bonaparte, Napoleone Girolamo.
Destinatario:
Cavour, Camillo Benso di.
Data:
31 Gennaio 1860.

                                                                                                            Paris ce 31 janvier 1860

      Mon cher Comte,
      Mon cousin Pépoli m'a remis votre lettre du 25, et c'est par lui que je vous fais parvenir cette réponse.
      Vous avez raison de croire que mes sentiments sont toujours les mêmes, ils n'ont jamais varié. Ceux que j'ai pour vous et qui sont nés l'année passée, à la suite des grandes affaires que nous avons traitées ensemble, ne sauraient non plus changer, et n'ont nullement été modifiés par l'impression fâcheuse que vous avez éprouvée de la paix de Villafranca. Ces quelques lignes de préambule étaient nécessaires pour bien établir que vous me retrouverez tel que vous m'avez connu l'année passée et que je suis charmé de reprendre nos relations pour mener à bien la grande cause de l'Italie.
      La paix de Villafranca que je n'ai point faite, dont je ne suis point responsable mais que j'ai approuvée comme un moyen de sortir d'une très mauvaise position, a été le résultat de nombreuses fautes militaires. La mauvaise situation militaire a fait faire à l'Empereur une mauvaise politique momentanément, mais, croyez-le bien, jamais les sentiments de mon cousin n'ont varié. Personnellement, dégoûté, mécontent d'un passé qu'il ne m'était pas donné de changer, je me suis retiré complètement des affaires pendant quelques mois, j'ai voyagé. Aujourd'hui mon cousin me fait l'honneur de me consulter quelque fois et je l'aide autant qu'il dépend de moi dans la politique généreuse, libérale, patriotique et nationale qu'il suit.
      Le renvoi de Mr Walewski est un grand bonheur; votre retour aux affaires est très heureux, mais, ne vous le dissimulez pas, la position est très grave, il vous faudra beaucoup de force et de courage, votre tâche est énorme et à l'intérieur et à l'extérieur. Je ne puis naturellement m'occuper que de cette dernière question.
      Avec une guerre prochaine en perspective que l'on accepte, que l'on appelle même de ses vœux, comme l'année passée, tout était beaucoup plus facile. Aujourd'hui il ne saurait en être ainsi pour la France; il se peut, je le crois, que nous arrivions encore à tirer l'épée avec le temps, car l'Italie n'est pas dans une situation normale, mais il ne faut pas songer à faire un appel à la force cette année. La plus entière entente est indispensable entre la France et l'Italie, il ne faut rien faire l'un sans l'autre, confiance, explication franche sur tout, voilà ce qu'il faut absolument. Je crois que nous pourrons nous entendre, je n'en doute même pas, connaissant l'élévation de votre esprit, et votre bon sens pratique. Une fois que nous serons bien d'accord vous savez que je suis assez énergique. Aujourd'hui avant de savoir exactement ce que nous voulons, permettez-moi de vous dire que je trouve que vous agissez trop seuls, que votre conduite surtout en Savoie et à Nice est fâcheuse! pour s'entendre il faut se voir, je ne crois pas que vous puissiez venir à Paris. Mais rien n'empêche et tout exige au contraire que tous les sujets soient abordés entre la France et le Piémont, but à atteindre et moyens pour y parvenir. Vous n'avez, pas plus que l'année passée, de représentant à Paris, Mr Des Ambrois est plus intelligent que Mr Villamarina, mais il est tout aussi difficile d'en rien tirer, le silence vienit-il de son caractère indécis ou du manque d'instructions de votre part, le fait est qu'il ne veut ou ne sait répondre à aucune question sérieuse. Envoyez donc de suite Mr Nigra, il a toujours réussi et il réussira encore. Je le verrai et m'expliquerai avec lui, ensuite il se mettra en rapport avec Mr Thouvenel et il en fera plus en trois jours que les intermédiaires actuels en trois mois.
      Pressez vous et faites-le partir dans quelques heures. À son retour à Turin bien des questions seront éclaircies et alors vous pourrez marcher résolument et énergiquement sachant ce que vous faites. Avant une entente cordiale et complète avec nous tout ce que vous faites est dangereux et peut gâter le grand but que nous voulons atteindre. Vous le comprenez bien, mon cher Comte, d'après votre lettre. Je pense que si vous faites partir Mr Nigra le 3 il pourra être ici le 5 et vers le dix février vous pourrez savoir à quoi vous en tenir assez à temps pour vos élections et les réunions des parlements italiens. Le ministre des Affaires étrangères est fort bien pour vous, cela facilitera bien les affaires.
      J'attends votre envoyé avec impatience et vous renouvelle, mon cher Comte, l'expression de tous mes sentiments les plus affectueux.
                                                                                                                Napoléon (Jérôme)

divisore
Nomi citati:
Napoleone Girolamo Bonaparte, ministre des Affaires étrangères, Pépoli, Empereur, Walewski, Des Ambrois, Villamarina, Nigra, Thouvenel.
Toponimi citati:
Paris, Villafranca, Italie, France, Savoie, Nice, Piémont, Turin.

Allegati