GEN
28
1860

Azeglio, Emanuele Tapparelli d' a Cavour, Camillo Benso di 1860-01-28 #3974


Mittente:
Azeglio, Emanuele Tapparelli d'.
Destinatario:
Cavour, Camillo Benso di.
Data:
28 Gennaio 1860.

                                                                                              28 janvier 1860 - 23 Park Lane

      Mon cher Comte,
      Vous devez être accablé de tant et de si importantes affaires que je n'ai pas voulu attirer votre attention sur un sujet aussi peu important que moi. Mais cela ne m'empêche nullement d'avoir pris la part la plus vive aux événemens qui vous ont amené d'abord aux portes du congrès, et maintenant à la direction des affaires. Nul ne regrettait plus que moi votre éclipse momentanée, et certes je crois avoir, chaque fois qu'une occasion s'est présentée, exprimé mon avis et ce qui est plus essentiel celui de la partie éclairée de ce public anglais dont je suis chargé de scruter les opinions.
      Si on illumine en Italie pour votre résurrection, en Angleterre on chante Hosannah. Depuis longtems le ministère précédent était frappé d'ostracisme et on vous proclamait le seul qui pût conduire à bien cette grande entreprise en des tems si difficiles. Les trois ministres italiens par excellence, P. R. et Gl., étaient en tête de liste sachant bien que, même dans l'intérêt de leur conservation, il valait mieux d'avoir à la tête du mouvement italien un homme porté par la confiance de ses concitoyens, capable de concevoir de grandes choses et ayant l'activité, l'énergie et le courage nécessaire pour les exécuter.
      J'étais à Brighton chez les Shaftesbury quand votre télégramme m'arriva et Milord s'écria dans un élan d'enthousiasme: «Hurrah God bless him. What can I do for him».
      L'ouverture du Parlement, en ramenant la publicité des débats, a eu l'avantage de prouver une chose, c'est que personne dans aucun parti n'osa se déclarer contre le privilège aux Italiens de s'arranger comme ils l'entendent.
      Normanby est le seul à s'avouer notre ennemi et je compte le remercier à la première occasion de s'être adjugé ce rôle ingrat, qui aurait pu tomber en partage à des mains plus dangereuses.
      Montecchi m'a fait lire ce matin une lettre qu'il adresse aux journaux et qui lui fait entendre de rudes vérités.
      Mais il ne nous faudrait pas croire trop aveuglément cet accord en notre faveur. Nous avons un antagonisme sourd à combattre en haut lieu, qui rayonne sur tous les adhérens. L'homme au menton s'il ne parle pas il ne pense pas moins, ajoutant au reste certain dépit pour son isolement. Lord Palmerston est le plus audacieux de ses collègues. Lord John est bien plus impressionable aux colères parlementaires, et déjà, craignant une marche en avant de notre part qu on l’accusera de nous avoir conseillée, il se fait tout petit et fait entendre des conseils de modération et de prudence. C'est pourquoi il faudra, je crois pour les tirer d'embarras, fare et lasciar dire. Un mouvement d'épaule tirant souvent d’embarras plus qu'un discours. D'ailleurs on ne peut guère demander conseil qu’avec disposition de le suivre. Sinon l'abstention semblerait préférable.
      J’ai vu un instant Gladstone hier, qui est toujours notre fido. Il m'a fait, en manière de plaisanterie, l'observation qu'il espérait bien que vous ne donneriez pas gain de cause à Normanby, qui prétend que le tarif à Livourne si favorable sous le Gouvernement toscan aux produits anglais serait sous régime sarde infiniment pus détrimental. Je l'ai rassuré, en lui demandant comment il pouvait croire le comte Cavour avec des idées restreintes en matière commerciale. Mais il serait bon en effet de s'en préoccuper.
      J'ai vu hier Granville après avoir assisté aux interpellations Normanby et vous avoir envoyé un télégramme. Est-ce la faute de la salle ou des orateurs: mais on n'entend qu'imparfaitement et répétant mot pour mot mon télégramme je demandai à Granville si j'avais bien interprété. Il dit qu'oui, excepté qu'au lieu de dire que les opinions de l'Angleterre étaient connues à Paris, il avait dit les objections. Mais il est curieux que les journaux anglais ce matin donnent ma version et pas la sienne.
      Le Prince d'Orange vient d'arriver à Londres. La Cour a expressément donné le mot d'ordre qu'on contredise tout projet de mariage. Il paraît qu'à Baden le jeune homme s'est laissé séduire par une Sirène française. C'est ici crime de lèse Majesté. Ensuite la petite princesse n'avait pas trouvé grande faveur près la Reine de Hollande. Cette visite est donc assez froide.
      Mr Leone Levi, membre distingué du barreau anglais bien que florentin, offre ses services aux pays par la lettre ci-jointe au baron Ricasoli que je me suis volontiers chargé de vous transmettre et recommander.
      Marliani vient de proromper dans ma chambre.
      Sa faconde ne me laisse que le tems de vous prier d'agréer les sentimens de mon respectueux dévouement.
                                                                                                                    V.E. d'Azeglio

divisore
Nomi citati:
Emanuele Tapparelli d'Azeglio, Gl., Lord Palmerston, Lord John, Normanby, P., R., Prince d'Orange, Reine d'Hollande, Leone Levi, Gladstone, Granville, Ricasoli, Montecchi, Marliani.
Toponimi citati:
Park Lane, Italie, Angleterre, Paris, Livourne, Brighton, Baden, Londres.

Allegati