GEN
20
1834

20 gennaio 1834 - 20 gennaio 1834


Diario:
1833-1834.

      Nous avons dîné, Montessuy et moi, chez Bordino; Marescalchi s’est joint à nous, et nous avons été fort gais. Cependant l’ami Montessuy, qui depuis son départ de Turin en 1832 a pris un certain air de fatuité financière et conquérante, a voulu un moment s’égayer à mes dépens. «Savez-vous, m’a-t-il dit, qu’à Gênes une personne m’a demandé quel était ce petit monsieur qui était toujours à l’ambassade et ressemblait si fort à tous ces petits doctrinaires qui pullulaient dans les salons de Mmes de Broglie et Decasez?». Cela m’a furieusement rappelé la lettre de Mme de Sévigné que notre cher abbé nous a dictée à l’académie, dans laquelle tous mes bons camarades ont vu une allusion à ma vanité et [à] ma pétulance d’alors. Quelque vraie que la comparaison pu être, ce n’était [pas] à Montessuy à me la répéter. Il a la morgue d’un aristocrate d’argent et de taille, que ne peuvent pas supporter ceux qui ont une aristocratie au moins aussi distinguée que la sienne: celle de la naissance et des talens.

      Charles Cappai m’écrit quelques jours après son arrivée à Cagliari; comme de raison, il me parle des impressions qu’il a éprouvées en revoyant sa patrie après trois ans d’absence. Voici les principales observations qu’il me communique:
 
      Il me paraît avoir retrouvé dans la classe éduquée une moindre aversion pour les innovations; elle paraît même disposée à accepter avec plaisir celles qui sont d’une utilité immédiate. J’ai trouvé bien des choses changées et remodernées avec goût; dans plusieurs maisons j’ai vu qu’on avait introduit les perfectionnemens qui servent à la commodité de la vie, qu’ils avaient négligée jusqu’ici. On a embelli les environs de Cagliari de promenades publiques. Plusieurs établissements publics ont subi d’utiles réformes. Dans ce moment on s’occupe de chercher un local pour bâtir une nouvelle prison, dans laquelle on a l’intention d’introduire le travail. La prison qui existe fait horreur. C’est une vieille tour, bâtie par les Pisans, dans laquelle sont parqués, comme des bêtes féroces, 360 individus. Rien ne peut donner une idée du misérable état où ils se trouvent. Renfermés, jusqu’à soixante dans une même chambre, où ils n’ont qu’un air méphitique à respirer et de mauvaises nattes de joncs pour se coucher, ils font pitié à voir. Ils sont entassés les uns sur les autres, sans classification, sans distinction aucune, de sorte que, les plus corrompus étant les plus considérés, ceux qui en entrant en prison conservaient encore quelques restes d’honnêteté, sortent aussi endurcis dans le crime que les plus grands criminels.

divisore
Nomi citati:
Montessuy, Bordino, Marescalchi, Charles Cappai, Mme de Sévigné, de Broglie, Decasez.
Toponimi citati:
Turin, Cagliari, Gênes.

Allegati