OTT
19
1833

19 ottobre 1833 - 19 ottobre 1833


Diario:
1833.

      J’ai lu le morceau de Th[éodore] Jouffroy, intitulé: Comment les dogmes finissent, et qui a eu dans le tems un si grand retentissement. L’auteur décrit d’une manière fort spirituelle la marche de la décadence d’un dogme vieilli, la perte de la foi dans sa vérité, les abus qui l’obscurcissent, l’esprit d’opposition qu’ils développent, la lutte qui s’en suit; le triomphe momentané du scepticisme qui abat, la réaction qui s’en suit en faveur des anciennes idées, à la faveur du vide qui tourmente les esprits, enfin la naissance et les progrès d’un dogme nouveau qui répondant et satisfaisant au besoin présent finit par remplacer définitivement les anciennes croyances. Tout cela est développé avec beaucoup de talent; mais d’une manière infiniment trop ingénieuse pour qu’elle soit à beaucoup près la représentation exacte de la vérité, ou à beaucop près. On serait tenté de croire à la précision et [à] la science qu’il déploie en traçant les évènemens de la lutte des opinions, que c’est de deux jouteurs habiles qu’il s’agit, qui employent tour à tour la force et la ruse pour se terrasser. De plus, le récit n’est point fait avec l’impartialité d’un juge; il y a beaucoup plus en lui de la passion d’un ennemi acharné du malheureux vaincu. Au reste, l’auteur est bien excusable si son jugement se ressent de la couleur qui animait le temps où il a fait son article; c’était en 1825, quand les anciennes idées, enhardies par des avantages éphémères reprenaient de l’audace et aspiraient ouvertement à réacquérir leur antique pouvoir sur le monde intellectuel par tous les moyens dont peuvent disposer la science et le pouvoir réunis. En présence de si irritantes prétentions, le calme philosophique chez un jeune homme aurait été d’un triste augure.
      Il y avait bien longtems que je n'avais pas passé, comme aujourd'hui, ma journée dans une solitude morale complète. Aussi, que de bien elle m'a fait; je me sens ce soir plus calme, plus grave, je dirais presque meilleur; mon esprit est tranquille, mon jugement se dépouille des passions qui l'obscurcissent lors-qu'il opère au milieu du brouhaha de la foule. En vérité, la solitude est une chose bien salutaire, elle retrempe l'âme, que les frottements du grand monde énervent continuellement; ma volonté grandit, et je me crois capable de bien plus grandes choses quand j'ai passé quelque tems seul vis-à-vis de moi-même. Peut-être, si je vivais pendant un espace de tems considérable dans cette solitude calme et silencieuse, en présence continuelle de la nature, en relation constante avec elle, peut-être ce que j'avais de sensibilité et qui [...] presque étouffé dans les luttes que mon caractère a eu à soutenir pour ne pas se fausser dès ma plus tendre jeunesse, se redévelopperait peu à peu et je redeviendrais accessible à toutes les douces émotions, que j'étais fait pour sentir, mais qui m'ont fait jusqu'ici un cœur froissé et endurci par de continuels combats. Mais un tel bonheur ne m'est pas réservé. L'effet salutaire de quelques jours de solitude sera bientôt détruit par l'atmosphère d'un monde où je suis placé en hostilité permanente avec bien des personnes qui devraient m'être chères.

                                           Des causes premières du christianisme,
                                           selon Mr Jouffroy et les éccletiques [sic]
 

      (Par l'expédition d'Alexandre toutes les nations de l'Orient firent connaissance); elles se comprirent, se contrôlèrent, se rallièrent au flambeau de l'esprit grec; et de cette union intellectuelle résulta le premier monde civilisé, le monde grec ou oriental, du sein duquel sortit le christianisme. Le christianisme, comme philosophie, fut le résumé populaire de tout ce que la sagesse de ce premier monde avait trouvé de vrai sur la destinée de l'homme. Les religions précédentes, filles des sens et de l'imagination, n'avaient été que des religions d'enfants et de barbares. Elles étaient d'une date antérieure à la civilisation. Le christianisme fut la première religion réfléchie, la première religion d'hommes. Il fut le produit, l'expression, le couronnement du premier âge de la civilisation et par cela même le principe du second.
                                                                                         Mélanges philosophiques, pag. 97

      La superstition est à la religion ce que l'astrologie est à l'astronomie, la fille très folle d'une mère très sage.
                                                                                                    Voltaire, Pol. et législation

divisore
Nomi citati:
Th Jouffroy, Jouffroy, Voltaire, Alexandre.

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